Accrédité par l’Association de Municipalités pour l’Indépendance (800 communes sur les 940 que compte la principauté catalane) et la Generalitat pour suivre le déroulement du référendum en Catalogne, j’ai vu le plus horrible et le plus beau.
J’ai vu les soubresauts de la bête immonde, faute d’avoir été tuée définitivement il y a 40 ans, frapper jusqu’au sang, et au risque fou de donner la mort, l’embryon d’une République Catalane qui, d’un pas mal assuré mais déterminé, marche déjà vers son destin. Il se nourrit de la bestialité réactionnaire d’une droite espagnole incarnée par Rajoy, Rivera et Philippe VI. De cette droite qui abrite encore l’idéologie franquiste et qui, pour des raisons de politique intérieure, attise dangereusement le nationalisme espagnol. Cet embryon s’alimente aussi des hésitations et difficultés… qu’ont eu les progressistes espagnols à défendre une position juste, mais désormais dépassée : une République catalane dans une fédération espagnole ; de la complicité des socialistes espagnols avec Rajoy ; de la lâche complaisance de l’Europe à l’égard de ceux qui tiennent la matraque. Pour toutes ces raisons, je crois qu’aujourd’hui aucun retour en arrière n’est possible sur le chemin conduisant la Catalogne vers une République indépendante.
J’ai vu et je ne suis pas prêt d’oublier !
Dimanche dernier j’ai vu l’horreur : mamans et grand-mères se faisant fendre le crâne par des gros bras assoiffés de sang, gavés de cognac, chauffés à blanc par leurs chefs dans les chambres-cabines de paquebots. J’ai vu, après la charge de la guardia civil, des flaques de sang devant un bureau de vote, des hommes mûrs pleurer après avoir voté, des Mossos d’Esquadra s’essuyer les yeux sous les acclamations d’une foule qu’ils avaient choisi de protéger face aux brutalités des militaires espagnols ; j’ai vu dans un parc public, un village entier (El Perello) exercer son droit à l’autodétermination et protéger les urnes sauvées par le Maire avec la complicité des Mossos après fermeture de bon matin par la Guardia Civil. J’ai vu et je ne suis pas prêt d’oublier ! Le monde entier aussi a vu et doit réagir contre la violence, la répression et pour la justice due aux 893 enfants ou adultes blessés plus ou moins gravement et traumatisés pour longtemps. La justice internationale doit passer car, à ce sujet, la confiance en la justice espagnole est impossible.
Malheureusement je crains qu’un retour en arrière soit impossible. Au demeurant, méfions-nous de propositions validant au fond les arguments de ceux qui comme le roi ou Rajoy déclarent le référendum illégal et son résultat non sincère. Cela ne correspond pas aux attentes d’une majorité des personnes vivant dans le Principat de Catalunya auxquelles il appartient de décider de leur avenir. L’Europe, les pays et les forces politiques qui la composent doivent maintenant décider si elles veillent à ce que la déclaration unilatérale d’indépendance se passe dans la démocratie et le respect des droits de l’homme ou si elles encouragent Rajoy et son gouvernement dans l’engrenage de la violence et du nationalisme espagnol qui vont conduire à étouffer la Catalogne jusqu’à l’explosion.
Nicolas Garcia
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