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En finir avec le règlement Dublin pour un vrai droit d'asile en Europe

Appel des collectifs, associations, citoyens solidaires à sortir de la politique du ni-ni
ni accueil des réfugiés, ni rejet du droit d'asile

Depuis mai 2017, la nouvelle majorité présidentielle a défini les axes de la politique d'accueil de la France à l'égard des réfugiés.

Malgré des promesses et l’affichage de mesures pour l’accueil (ouverture de nombreux centres d’hébergement, promesse d’accélérer la procédure d’asile..), la politique menée par la France n’est pas à la hauteur. Cet affichage se double d’une politique de répression très dure à Calais, de poursuite des sans-papiers dans les centres d’hébergement d’urgence, et d’une politique d'expulsion massive de ses demandeurs d'asile grâce aux rouages du règlement Dublin III.

Les collectifs, associations et citoyens solidaires, atterrés de ce double discours et dénonçant avec force le règlement Dublin, appellent à un changement radical de politique.

Le règlement Dublin c’est quoi ?

C'est la règle européenne prévoyant qu'un réfugié potentiel doit demander l'asile dans le premier pays européen où il pose le pied, sauf quelques exceptions (membre de famille déjà présent dans un Etat membre, par exemple, ou risque de mauvais traitements dans le premier pays d'accueil...). La preuve de son passage dans un pays européen est généralement constituée par l'enregistrement de ses empreintes digitales dans le fichier Eurodac. Cette prise d'empreinte est très souvent obtenue par la contrainte ou la force.

A lui seul, ce signalement Eurodac justifie l'application aux demandeurs d'asile d'une procédure dite « dublin », au terme de laquelle ils peuvent être renvoyés dans le premier pays européen traversé. Dans la logique de cette procédure, les personnes sont renvoyées sans avoir jamais l'occasion d'exposer les raisons de leur venue en France.

Cette procédure permet à la France de faire obstruction à une grande partie des demandes d’asile déposées sur son territoire.

En France, une politique de plus en plus répressive envers les dubliné.e.s

Le règlement Dublin III est un prétexte au non-accueil.

L'application de la procédure Dublin n'est pas obligatoire, les Etats sont libres d'examiner les demandes d'asile de toute personne [1].

C’est le choix inverse qui a été fait par la France : dès 2016, les préfectures ont reçu l’ordre d’appliquer systématiquement la procédure Dublin aux personnes signalées dans le fichier Eurodac. Cela a permis d’augmenter les renvois de 150% entre 2015 et 2016. En 2017, ils ont augmenté de 124%.

Le règlement Dublin III est un prétexte à une politique répressive et liberticide.

Le mécanisme de la “fuite”, un moyen de fragilisation des dublinés. Lorsqu’une personne en procédure dublin tente de s’y soustraire, elle est dite “en fuite”. La fuite lui fait perdre le bénéfice de ses droits de demandeur d’asile (à savoir une allocation de subsistances et un hébergement) et rallonge la procédure de 12 mois. La fuite s’appuie une appréciation du risque non-négligeable de fuite. Dès lors que ce risque est établi, la préfecture est autorisée à placer le dubliné en rétention à tout moment. Pour éviter que les personnes soient placées arbitrairement en rétention, plusieurs juridictions ont déjà estimé qu’il fallait que cette notion soit définie par la loi, ce qui n’est pas encore le cas en France [2].

Grâce à une proposition de loi qui sera adoptée définitivement par le Parlement le 15 février, la France est en train de se doter d’une définition très large du risque non-négligeable de fuite. Il sera par exemple possible de considérer que ce risque existe dès le début de la procédure, au moment de la saisine de l’autre Etat, si le demandeur d’asile y a été débouté. De plus en plus, les dublinés, sous la menace d’être arrêtés, placés en rétention et renvoyés de force, sont poussés à fuire à un stade précoce de la procédure.

Tous réfugiés, tous dublinés, tous enfermés.

L’hébergement des dublinés ou “le diable s’habille en PRAHDA”.

Le gouvernement peut se vanter d’ouvrir de nombreuses places d’accueil. En effet, il a multiplié les programmes d’hébergement spécifiques comme les PRAHDA (Programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile), CAO (Centres d’accueil et d’orientation), CHUM (Centre d’hébergement d’urgence migrants), CARDA (Centre d’assignation à résidence de demandeurs d’asile). Comme leurs noms ne l’indiquent pas toujours, ces programmes consistent en l’ouverture de centres où s’opère un contrôle administratif stricte : afin de mieux repérer les dublinés, voire de les assigner à résidence, ou de les exclure des dispositifs d’hébergement en cas de fuite [3].

La peur d’être arrêtés à même ces lieux pousse de nombreux dublinés à les quitter rapidement. Exclus des dispositifs, sans ressources, ces dublinés constituent un terreau de vulnérabilité formidable pour les réseaux d'exploitation, de travail au noir, de mendicité.

Si la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, elle ne se prive pas d'en créer.

C’est au prix de toute cette souffrance humaine, et de tous ces moyens financiers déboursés en contrôle et renvois, que la France a fait l’année dernière l’économie ridicule de 36 demandes d’asile [4].

En Europe , le règlement Dublin III ne permet pas un accès équitable à l’asile

Les dublinés ne refusent pas leur transfert vers d'autres pays par caprice, mais bien parce qu'ils craignent à raison que leurs droits n'y soient pas respectés. Car l’application du règlement dublin s’appuie sur une fable : l’équivalence du système d’asile d’un État européen à l’autre. Il n’y a pas d’harmonisation du droit d’asile en Europe.

Il existe d'énormes inégalités dans le traitement des demandes d'asile d'un État européen à l'autre. Selon sa nationalité, et selon les périodes, les chances pour un demandeur d'asile d'être reconnu réfugié varient selon les pays de 80 % à 50 % voire 3 % ! Le règlement Dublin empêche de reformuler une demande d'asile ailleurs : ainsi, non seulement il empêche le choix du pays d'arrivée, mais il ne laisse aucune seconde chance.

Le règlement Dublin III empêche l’application du droit d’asile dans les pays frontaliers. Les premiers pays d’arrivée sont confrontés à deux flux d’arrivée des migrants : arrivées à leurs frontières et renvois des dublinés depuis les autres pays. Ces pays sont donc rapidement mis hors d’État d’appliquer le droit d’asile. C’est le cas de la Grèce, de l’Italie et de la Hongrie*. Abandonnés dans l'accueil des réfugiés, ces quelques États frontaliers fournissent alors un bon argument pour dire « On ne peut pas accueillir les réfugiés ! Regardez comme cela se passe mal ! »

Le règlement Dublin III organise le refoulement des demandeurs d’asile.

La convention de Genève de 1951 prévoit que: ”Aucun des Etats contractants n’expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté seraient menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques“ C’est le principe de non refoulement, qui s’impose à tous les Etats membres. Pourtant, les Etats de l’Ouest et du Nord comptent sur les Etats frontaliers pour opérer un tri, et limiter les entrées sur le territoire européen. C'est ce dont il est question quand Emmanuel Macron dit que l’application du règlement dublin est nécessaire pour “responsabiliser” les pays d’entrée sur le sol européen. Ce qui est attendu d’eux est bien d’intercepter les demandeurs d’asile avant leur arrivée dans les autres pays européen [5].

De plus, la notion de « pays sûr » n'est pas homogène en Europe : s'il n'est par exemple pas dans les pratiques en France de renvoyer des personnes en Afghanistan, ce n'est pas le cas de la Norvège, la Belgique, la Croatie ou l'Allemagne. Lorsque la France transfère ses « dublinés » vers ces pays, elle ferme les yeux sur leur avenir. Elle participe activement au refoulement de demandeurs d’asile vers des destinations qu’elles considère comme dangereuses, mais s’en déresponsabilise.

Le règlement Dublin III génère des violences et violations graves des droits humains.

Dans les pays frontaliers, le rapport de force entre les autorités et les migrants est de fait exacerbé. Cela génère débordements graves qui ont été dénoncés maintes fois par les institutions et les ONG :

  • en Bulgarie : L'UNHCR ainsi qu'Amnesty International dénoncent depuis des mois violences, incarcérations arbitraires, traitements dégradants à l'égard des personnes exilées
  • en Italie : dans un rapport, Amnesty a fait état de traitements dégradants voire de torture à l'égard des réfugiés
  • en Hongrie : Le pays est également dans le viseur de l'UNCHR et d'Amnesty International pour traitements dégradants et violences à l'égard des exilés. Récemment, le HCR a demandé aux États de cesser tout transfert en Hongrie car la loi permet désormais d'enfermer systématiquement tous les migrants, qu'ils soient ou non réfugiés potentiels, à leur arrivée.

Exiger un traitement digne n'est pas un caprice, c'est un droit

Pour une politique conforme à nos valeurs et nos engagements.

Lorsque des réfugiés arrivent sur son territoire, la France effectue un tri absurde et injustifié entre les « bons réfugiés », et les « dublinables ». Pour des raisons géographiques évidentes, mais aussi du fait des sanctions infligées aux entreprises de transport, il est devenu quasiment impossible de venir demander l'asile en France sans passer par un autre pays européen. Echapper au règlement Dublin III relève du hasard et de la chance.

Ce tri permet à la France d'afficher une politique d'accueil ne concernant qu'une minorité des demandeurs d'asile, tout en pratiquant une politique brutale de renvoi et d'obstruction au droit d'asile.

Une autre voie est pourtant possible, plus conforme aux valeurs de notre pays, que chaque élu.e, et chaque représentant.e de la République doit porter. Nous vous invitons à envoyer ce texte à vos députés, sénateurs et autres responsables locaux, avec en objet #STOPDUBLIN afin de faire connaître notre désaccord à nos élus. Prendre rendez-vous avec eux sera plus efficace si vous pouvez le faire.

C’est URGENT ! Des amendements quant à la rétention des dubliné.e.s seront votés le jeudi 15 février 2018 à l’assemblée !

Le règlement Dublin n'est pas une fatalité, nous pouvons lutter contre le durcissement de la politique migratoire :

  • ALERTEZ vos députés et élus locaux

  • INTERPELLEZ vos préfets à chaque expulsion dont vous êtes témoin

  • ORGANISEZ une mobilisation contre le projet Dublin IV

Si vous souhaitez que votre asso/collectif soit signataire, contactez-nous : stopdublin@gmail.com

[1] Article 17 du Règlement dublin : Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement.” Article 53-1 al 2 de la Constitution : “Toutefois, même si la demande n'entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif.”     
[2] La généralisation de la fuite : La loi de décembre. Date du vote.
[3] Sur les dispositifs d’hébergement hors droit commun.
[4] Sur le bilan Dublin 2017. D’après les donnés Eurostat pour l’année 2016, la France a renvoyé 1293 dublinés et a reçu 1257. Transferts dublins sortants.
[5] Discours de Macron à Calais sur Dublin.

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En finir avec le règlement Dublin pour un vrai droit d'asile en Europe

le 14 February 2018

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