La « réconciliation nationale » proposée hier à la séance extraordinaire du parlement de Catalogne par le leader des socialistes catalans Miquel Iceta n’a pas réussi à convaincre la majorité indépendantiste, Junts per Catalunya, ERC et la CUP ayant voté contre. En revanche, les élus « podémistes » de Catalunya en Comú-Podem ont voté favorablement. Leur porte-parole Marta Ribas s’est même réjoui que les socialistes catalans se démarquent enfin de leurs collègues espagnols du PSOE qui soutiennent le gouvernement du Partido Popular dans la mise sous tutelle de la Catalogne.
Éclatement des deux blocs
La proposition n’a pas récolté le nombre de voix nécessaire pour être adoptée, certes, mais c’est tout de même un premier pas qui laisse entrevoir l’éventualité d’un éclatement des deux blocs dressés l’un contre l’autre au Parlement catalan : une majorité de trois partis indépendantistes contre une grosse minorité de trois partis dits « unionistes » (défenseurs de l’unité de l’Espagne, NDLR), mais de fait, totalement désunis entre eux : PP, PSC, et en tête, le parti de Ciutadans (C’s). Un premier pas qui semble aller dans le même sens que celui que proposait samedi dernier le chef de file de Catalunya en Comú Xavier Domènech : susciter un vaste front commun avec les partis indépendantistes, et incluant le PSC et les syndicats (CCOO et UGT, et autres). Le but étant de créer un climat favorable à la formation d’un gouvernement de concentration. Une idée qui a plu au Président du Parlement Roger Torrent (ERC) qui est allé derechef en parler avec les syndicats.
Mais, pour le moment, la majorité indépendantiste doit faire « purger » les péchés des socialistes. Du côté du parti leader, la porte-parole de JxCat, Elsa Artadi, tout en félicitant Miquel Iceta de son « timide revirement », lui a reproché de « faire semblant que les socialistes n’ont rien à voir » avec la paralysie des institutions en Catalogne, tout en rappelant que le PSOE a apporté son « soutien inconditionnel » à Mariano Rajoy, un soutien qui, selon elle, rend les socialistes « complices » des violences policières contre les votants au référendum du 1er octobre, ainsi que de la « destitution du Gouvernement (catalan) suite à la mise en œuvre de l’article 155 (de la Constitution) ». L’ex dirigeant socialiste Ernest Maragall (frère de l’ex-Président de la Generalitat, Pasqual Maragall), aujourd’hui Député d’ERC, a accusé Iceta de « se placer au-dessus du bien et du mal », de distribuer des conseils « sans assumer aucune responsabilité » dans les événements. À l’instar de la porte-parole de JxCat, Maragall a critiqué lui aussi « l’absence d’empathie » des élus du PSC envers leurs collègues emprisonnés, ce qui à son avis enlève « la moindre légitimité » à la proposition de son leader. Un reproche que le dirigeant socialiste a réfuté en remarquant que tout geste au sein du parlement porte en lui une connotation politique, assurant travailler davantage dans l’ombre, en faveur de ses camarades emprisonnés « que pour des barrages sur les routes ». D’ailleurs, le chef de file des socialistes catalans a avoué être préoccupé par l’apparition de signes de « radicalisation » au sein de certains groupes.
C’s essaie de déloger Torrent
Le vote majoritaire de JxCat, ERC et la CUP a permis d’adopter deux résolutions, l’une visant à obtenir la libération des élus incarcérés et une autre reconnaissant le droit à l’investiture des candidats Carles Puigdemont, Jordi Sànchez et Jordi Turull. Le parti Ciutadans a proposé de déloger Roger Torrent de la présidence de la chambre, accusé de prendre des décisions partisanes en faveur du bloc indépendantiste. Cette proposition n’a obtenu que 40 voix en sa faveur (37 de C’s et 4 du PP) et 83 voix contre : celles des 4 partis indépendantistes (68), plus les 8 voix de Comú-Podem et les 17 voix du PSC, qui pour la première fois s’est effectivement positionné en dehors du bloc des unionistes.
Joana Viusà (L'Indépendant, le 29 mars 2018)
L’ancienne dirigeante catalane Clara Ponsati, visée par un mandat d’arrêt européen pour avoir pris part à la déclaration unilatérale d’indépendance de la Catalogne, s’est rendue hier à la police en Ecosse où elle s’est exilée.
L’ex-Ministre catalane, arrivée peu avant 11 heures au commissariat Saint Leonard d’Edimbourg, devait présentée à un tribunal de la capitale écossaise, a indiqué son avocat, Aamer Anwar. Elle demandera sa remise en liberté conditionnelle avant une audience sur son éventuelle extradition vers l’Espagne, où la justice l’accuse de « rébellion violente et de détournement de fonds publics en lien avec l’organisation du référendum » sur l’indépendance de la Catalogne, qui s’est tenu le 1er octobre 2017.
« Persécution politique »
Clara Ponsati souhaite se « défendre vigoureusement » contre ces accusations qu’elle réfute et qui relèvent selon elle d’une « persécution politique », a ajouté son conseil. Elle soutient que les tribunaux espagnols ne peuvent garantir ses droits.
Une levée de fonds a été lancée hier sur internet pour soutenir sa défense, qui a déjà permis de récolter plus de 95.000 livres en quelques heures.
L’ex-dirigeante figure parmi les six indépendantistes catalans partis à l’étranger pour lesquels la Cour suprême espagnole a émis ou réactivé vendredi des mandats d’arrêt européens et internationaux.
Comme d’autres leaders catalans, Clara Ponsati s’était exilée en Belgique le 30 octobre 2017, après la destitution de leur exécutif et la mise sous tutelle de la Catalogne, décidées par Madrid pour punir la déclaration unilatérale d’indépendance du 27 octobre. Elle s’est installée il y a peu en Ecosse où elle travaille pour l’université de St Andrews (côte est) en tant que professeur d’économie et où elle a reçu le soutien de membres du Parti nationaliste écossais (SNP), qui partage les aspirations des indépendantistes catalans.
L'Indépendant, le 29 mars 2018
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