Des centaines de milliers d’indépendantistes catalans demandent la libération des « Jordis ».
182 jours. Soit six mois pile, de puis ce lundi. C’est le temps qui s’est écoulé depuis le 16 octobre, jour de la mise en détention préventive des deux « Jordis », Jordi Cuixart et Jordi Sànchez, ex-leaders des associations indépendantistes Òmnium Cultural et Assemblea nacional catalana (ANC). Le droit espagnol autorise jusqu’à deux ans de détention provisoire sans jugement. Un long hiver est passé depuis leur placement en cellule dans le centre pénitentiaire de Soto del Real (Madrid) et plusieurs centaines de milliers d’indépendantistes sont venus exprimer leur soutien aux « Jordis » et au reste des leaders en prison ou en exil.
Les associations bientôt rendues illégales ?
Sur l’avenue Parallèle de Barcelone, de la place d’Espagne à celle de Drassanes, proche du port, ils étaient 315.000 selon la police municipale. L’Espai Democràcia i Convivència (EDC), lui, revendique plus du double, soit 750.000 manifestants, venus notamment en autocars (un millier) des quatre coins de la Catalogne. Au sein de cette nouvelle plateforme qui convoquait la mobilisa- tion d’hier se trouvent onze associations civiles et syndicats, parmi lesquelles, c’est une nouveauté, les filiales catalanes des syndicats espagnols Union générale des travailleurs (UGT) et Commissions ouvrières (CCOO), qui survivent pourtant par perfusions de subventions de l’État espagnol.
La liste des membres de l’EDC comprend, bien sûr, Òmnium et l’ANC, dans les rangs de laquelle on se prépare à disparaître un jour. « On ne peut pas savoir quand cela arrivera, confie un membre de l’ANC, association qui fêtera ses sept ans à la fin du mois. Dans un mois, six mois, un an ? Mais on se prépare déjà mentalement et surtout stratégiquement à ce que l’association soit rendue illégale. » Cette crainte, qui habite l’associationnisme indépendantiste depuis le mois d’octobre, a été alimentée par les deux visites de la Guardia civil aux sièges des deux entités depuis le référendum.
En attendant cette éventuelle offensive de la justice espagnole, la société civile indépendantiste a réussi hier à remobiliser ses troupes. « Ce genre de manifestations peut participer à éveiller l’inquiétude de la communauté internationale de la situation actuelle », a résumé Ben Emmerson, l’avocat anglais spécialiste des droits humains qui porte le dossier de Carles Puigdemont, d’Oriol Junqueras de Jordi Cuixart et Jordi Sànchez auprès de l’ONU. Croisé hier au milieu de la foule, l’avocat s’est voulu confiant sur le fait « que le pacifisme catalan finira par vaincre, puis poussera Madrid à la négociation ». C’est aussi ce qu’espèrent les masses mobilisées hier. Peu enclins à suivre la voie consistant à couper l’Autoroute AP-7 ou à organiser diverses actions de sabotage, les indépendantistes du dimanche préfèrent continuer d’appeler au secours de l’Europe, à coup de manifestations massives comme hier. Les élus, ceux qui restent en liberté, sont appelés à faire le reste.
À Barcelone, Fabien Palem (L’Indépendant, le 16 avril 2018)
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