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Pourquoi j’ai signé le texte alternatif « Urgence de communisme » ? Contribution de René Granmont (Section Aspres-Têt)

Voici quelques-uns des points de désaccord qui me conduiront à ne pas voter pour le texte du conseil national mais pour le texte alternatif.

Comme Francis Wurtz, pour la première fois depuis près de soixante ans, je ne peux malheureusement pas valider le projet de base commune adopté à une courte majorité par le Conseil national. À la première lecture de ce texte, j’ai eu le sentiment qu’il prenait trop peu en compte les considérables évolutions de notre monde depuis le début de ce siècle. Évolutions qui nécessitent une analyse très précise s’appuyant sur des recherches approfondies, permettant de construire un réel Parti communiste du XXIe siècle.

Ce sentiment de « déjà lu » éprouvé lors d’une rapide première lecture s’est trouvé renforcé, par exemple à la lecture des page 22 et 23 où l’analyse de l’expérience soviétique n’est même pas au niveau de ce que le Parti expliquait … dès 1976.

Le bilan…

J’ai ensuite ressenti un profond malaise devant l’espèce d’autosatisfaction qui traversait l’analyse critique du chemin parcouru depuis le congrès précédent. Il ne s’agit pas de noircir le bilan, mais toutes les dernières échéances électorales ont le plus souvent été marquées par un recul de notre parti (baisse du nombre de communes de plus de 20.000 habitants, aucun député au Parlement européen, perte du conseil départemental du Val-de-Marne, 2,28 % à l’élection présidentielle ; et si nous doublons le nombre d’élus régionaux, c’est dans le cadre de listes de rassemblement) et le nombre d’adhérents a encore diminué depuis le 38ème congrès (chute de 10.355 cotisants, soit 20,93 %  en 4 ans !)… La bonne image médiatique de notre secrétaire national ne saurait suffire pour nous priver d’un examen très sérieux de notre déclin continu, car, comme le souligne le texte alternatif, « les causes de notre affaiblissement historique sont plus profondes ».

Puis, plus qu’un sentiment, ce sont de vrais désaccords qui sont apparus. De manière un peu schématique, citons-en quelques-uns.

Anthropocène ou capitalocène ?

La vision de la société et du monde ne me semble pas en adéquation avec les enjeux de notre époque. Ainsi, je ne pense pas que la cause première de la crise écologique soit l’action des hommes sur la nature (l’anthropocène, aujourd’hui récusé par nombre de scientifiques), le capitalisme en n’étant qu’un facteur aggravant. Cette vision place l’ensemble des humains au même niveau de responsabilité. Je préfère, comme le texte alternatif, parler de capitalocène pour mettre en cause le mode de production et de consommation engendré par la domination capitaliste.

Contre toutes les dominations…

Autre exemple. Je ne peux me satisfaire de la façon dont, même s’il s’en défend, le texte du Conseil national hiérarchise les différentes luttes émancipatrices qui se font jour, faisant du monde du travail « la force motrice », donc prééminente, pour changer la vie. A l’opposé, « Urgence de communisme » précise bien que « nous avons eu tendance à prioriser les luttes sociales, voire à minorer certains combats en les renvoyant aux aspirations de couches sociales relativement favorisées des centres ville ou à les mettre en opposition aux luttes des catégories populaires des banlieues ou des périphéries. Nous devons corriger cette erreur. » Car, que ce soit le féminisme en lutte contre la domination patriarcale (qui précède, et de loin, la domination capitaliste), l’antiracisme qui combat la logique de domination basée sur la hiérarchisation des êtres humains,  le combat écologique qui ne peut exister sans remettre en cause la domination capitaliste, ou les combats sociaux contre l’exploitation capitaliste, le dénominateur commun de tous ces mouvements, de tous ces combats, est le refus des logiques de domination. Et c’est bien parce que la caractéristique du communisme est de sortir de ces logiques de dépossession, de ces aliénations, qu’il y a aujourd’hui « urgence de communisme » et possibilités de communisme. Et le Parti communiste existe, comme l’écrit le texte alternatif, « pour porter cette perspective. Elle nécessite une stratégie qui articule luttes immédiates et logiques de transformation sociale poussant en permanence les avancées possibles d’un processus révolutionnaire porté par le peuple lui-même comme l’imaginait Marx. »

… urgence de communisme

Ce qui conduit à un point essentiel de mon désaccord avec le texte de la direction du PCF et de mon soutien au texte alternatif, celui de la conception de la stratégie de transformation sociale.

Si je résume la vision du  projet de la direction nationale, résumé qui, je le concède, est très simplifié, les communistes se battent pour aller aux « Jours heureux » répondant à l’exigence d’une « République sociale » (cf Fabien Roussel durant l’élection présidentielle), puis obtenir des « avancées progressistes », puis plus tard (beaucoup plus tard ?) nous pourrons envisager la construction du communisme. Cette stratégie des étapes, ce que Bernard Vasseur appelle « étapisme », a été celle du PCF depuis des décennies, … avec le succès que l’on sait. N’est-il pas temps, comme le souligne le texte alternatif, de faire du prochain congrès « un moment d’analyse renouvelé et d’innovation communiste » ? D’autant plus que « le seul discours anticapitaliste ne peut suffire, nous réduisant à nous battre dos au mur, condamner à limiter les dégâts, tout en laissant intact le pouvoir du capital, faute de rendre crédible l’alternative nécessaire ».

Or selon que nous sommes dans une stratégie d’étapes ou dans un processus de « déjà là communistes », le rôle de notre parti et surtout le rôle du peuple ne sont pas du tout les mêmes. Attention, conquérir des « déjà là communistes » ne veut pas dire que la société est devenue communiste, cela veut dire imposer la confrontation pour installer dans la société capitaliste des espaces dont la logique la subvertit. Et faire apparaître concrètement la perspective d’une autre société. Le meilleur exemple n’est-il pas la sécurité sociale créée par Ambroise Croizat et dont la bourgeoisie n’a eu de cesse de la faire mourir ? Le texte alternatif précise la dialectique qu’il convient de mettre en œuvre en s’impliquant « dans les luttes populaires et les grands mouvements de l’époque pour y faire cheminer des idées transformatrices sans attendre, ni les renvoyer aux calendes grecques jusqu’à atteindre des points de rupture révolutionnaires. »

Quel rassemblement ?

Dernier point qui m’a confirmé dans mon choix : la conception du rassemblement. La vision du texte du conseil national me semble étroite et, à mon avis, préjudiciable au Parti communiste (voir les résultats électoraux) et dangereuse pour le pays, comme l’a montré le cavalier seul des communistes à l’élection présidentielle alors que Le Pen était (et est encore) aux portes de l’Elysée…

Ce qui pose clairement la question du positionnement du PCF par rapport à la NUPES. Il y a urgence à le fixer pour les prochaines échéances électorales. Comme le dit le texte alternatif, « le compte à rebours est enclenché dans la bataille face à l’extrême-droite d’autant qu’Emmanuel Macron est en train d’accélérer son remodelage ».

Le texte du conseil national dresse un bilan contrasté et sans avenir de la NUPES, la gauche se heurtant « à un plafond de verre ». Affirmation, à mon avis, très discutable, le total des voix de la gauche entre les premiers tours des élections présidentielles de 2017 et 2022 ayant progressé d’environ 1.250.000 voix.

Pour le texte alternatif, s’il convient de s’opposer aux volontés hégémoniques de la France Insoumise, et sans minimiser les difficultés, « il faut agir pour faire évoluer le cadre et la démarche de la NUPES ». Car c’est bien de cela qu’il s’agit, l’union est un combat et déserter le terrain de ce combat ne fera que détruire l’espérance qu’avait fait naître ce rassemblement. Certes, des divergences de fond subsistent, des insuffisances demeurent, mais l’objectif n’est-il pas, en s’appuyant sur l’intervention citoyenne « de démocratiser la NUPES pour une dynamique populaire majoritaire ».

Voilà quelques-unes des raisons qui m’ont conduit à soutenir le texte « Urgence de communisme ». Place au débat … dont je regrette beaucoup la brièveté.

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Pourquoi j’ai signé le texte alternatif « Urgence de communisme » ? Contribution de René Granmont (Section Aspres-Têt)

le 17 January 2023

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