Cher·es camarades,
Avant de faire le point sur le mouvement social contre la réforme des retraites, je souhaite d’abord m’arrêter sur la gravité du séisme qui a frappé lundi 6 février la Turquie et la Syrie.
Le bilan s’élevait dimanche soir à plus de 33.000 morts, selon les dernières informations officielles.
Le tremblement de terre de magnitude 7,8 a fait plus de 29.000 morts dans le sud de la Turquie a annoncé l'organisme public turc de gestion des catastrophes tandis que les autorités ont dénombré plus de 3 000 morts en Syrie.
Et selon l'Onu, le bilan pourrait encore « doubler ».
Les régions touchées, réprimées depuis longtemps par Erdogan, non seulement ne bénéficient pas des secours nécessaires, mais voit la propagande médiatique expliquer que le gouvernement est à la hauteur.
Adiyaman, ville de 250.000 habitants, près de la faille séparant les plaques anatolienne et arabique, a été rayée de la carte, transformée en enfer. Comme d’autres villes, elle a été abandonnée par le pouvoir turc. Face au désastre humain, c’est le HDP qui travaille à coordonner la gestion de la crise.
L’aide internationale est loin d’être à la hauteur. En Turquie et évidemment en Syrie en guerre et sous le coup de sanctions internationales. Nous appelons la France à la solidarité internationale. Face aux immenses besoins, le secours populaire et nos camarades de l’association France Kurdistan ont lancé un appel aux dons. Donnons lui l’ampleur nécessaire.
Enfin, toujours sur les enjeux internationaux, face à l’escalade guerrière en Ukraine, Fabien Roussel a appelé la France à prendre des initiatives pour la paix (voir tribune du 5 février dans le JDD).
Le collectif national « En Marche Pour La Paix » appelle à contribuer partout en France, les 24 et 25 février 2023, à la mobilisation mondiale en faveur de la Paix en Ukraine. Relayons et faisons vivre cet appel à la date anniversaire du déclenchement de la guerre dont les développements appellent plus que jamais notre mobilisation.
1) Une 4e journée d’action contre la réforme des retraites qui confirme un mouvement inédit
J'en viens à la situation en France et à la puissante mobilisation en cours contre la réforme des retraites quelques jours après les puissantes manifestations de samedi qui ont réuni plus de 2,5 millions de manifestant·es dans 250 rassemblements.
Ce sont des mobilisations exceptionnelles des salarié·es, des privé·es d’emplois, des femmes, des jeunes. C’est le mouvement de la France du travail. C’est le mouvement de la France des villes moyennes et des sous-préfectures qui rejoint les forces traditionnelles du mouvement social. Leurs habitant·es ont une fois de plus défilé en nombre samedi dernier. D’ores et déjà un constat s’impose : elles réunissent dans ce mouvement plus de la moitié des manifestant·es. C’est bien supérieur au niveau habituel de mobilisation dans ces territoires.
Pour la cinquième journée d’action ce jeudi, les numéros un des centrales défileront d’ailleurs ensemble à Albi dans le Tarn pour souligner ce mouvement et pour amplifier la pression sur les députés de tous les territoires du pays.
La mobilisation continue de grandir derrière l’apparente stagnation des chiffres. Ce samedi, nous avons encore toutes et tous constaté que des manifestantes et manifestants participaient pour la première fois à l’une des manifestations contre la réforme voire à une manifestation tout court.
La journée a également été marquée par une grève surprise des contrôleurs aériens à l’aéroport d’Orly conduisant à l’annulation de 47 vols.
Après un mois de mobilisation, l’opinion reste très majoritairement opposée au projet et favorable au mouvement social. Plus de sept Français·es sur dix et neuf travailleurs·euses sur dix se disent opposés au projet de réforme. Plus de 4 Français·es sur dix se disent prêts à soutenir des grèves plus massives.
Le gouvernement masque mal sa fébrilité comme en témoigne sa difficulté grandissante à argumenter le bien-fondé de sa réforme.
Interview après interview, les termes de « justice » et de « progrès » ont laissé la place à l’« effort » et au besoin d’« équilibre » du système pour le sauver. À l’aveu de Franck Riester sur la retraite des femmes a succédé celui d’Olivier Dussopt sur la pension minimale à 1200 euros forcé de confirmer le nombre limité de personnes auxquelles elle s’appliquera. Enfin, les appels de la Première Ministre aux secrétaires généraux de la CFDT et de FO ce week-end n’auront débouché sur rien.
2) L’intersyndicale unie appelle à « durcir le mouvement »
Dans un appel publié le 11 février, l’intersyndicale appelle à « durcir le mouvement » et annonce deux nouvelles journées de grèves et de manifestations.
Le 16 février d’abord, jeudi prochain, avant la fin de la discussion à l’Assemblée.
Et le 7 mars préparé avec l’objectif de « mettre la France à l’arrêt » ce jour là.
L’intersyndicale appelle également à se saisir du 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes « pour mettre en évidence l’injustice sociale majeure de cette réforme envers les femmes ».
Il faut souligner le caractère exceptionnel de cette intersyndicale, inédite depuis 12 ans, qui se construit comme l’affirment Laurent Berger et Philippe Martinez sur des rapports de « confiance » et de « franchise ». Sans nier les différences entre les organisations, qu’ils s’agisse des modalités d’action contre la réforme ou de leur projet syndical pour les retraites. Mais les organisations parviennent à être unies sur l’essentiel pour le rejet de la réforme. Et cela montre que le syndicalisme de lutte peut mobiliser largement. En lien avec le mouvement inédit qu’elles ont parvenues à créer, la CGT et la CFDT revendiquent chacune 10.000 nouvelles adhésions en un mois. C’est une très bonne nouvelle pour le syndicalisme.
L’intersyndicale de la RATP appelle à une grève reconductible à partir du 7 mars. Les Fédérations CGT des Mines et de l’Énergie (FNME), des Industries Chimiques (FNIC) et des Ports et Docks, rejointes par la Fédération CGT des Cheminots, ont décidé de coordonner le plus possible leurs actions afin de développer l’efficacité des mobilisations de leurs syndicats dans les territoires.
3) Les enjeux du débat parlementaire
Il ne reste désormais que cinq jours aux députés pour examiner le texte. Vendredi soir à minuit, le texte sera envoyé au Sénat.
La droite sera d’autant plus au centre des projecteurs qu’elle y est majoritaire.
Gérard Larcher et Bruno Retailleau ont été clairs sur la nécessité de voter la réforme. Ce dernier déclarait hier qu’« avec un endettement de 3.000 milliards d’euros, il n’y a pas d’autre alternative, sauf à vouloir augmenter les impôts ou baisser les pensions ».
Éric Ciotti reunira mardi le bureau des LR pour tenter d’unir sa famille politique aujourd’hui beaucoup plus partagée à l’Assemblée.
Notons que les députés LR réfractaires à la réforme des retraites ont en commun d’être des élus du monde rural à l’électorat populaire, de l’Oise, de la Corrèze, du Cantal, de la Loire ou de l’Ardèche.
Si des paroles fortes à gauche se sont exprimées contre le projet de réforme à l’Assemblée, mesurons que nombre d’évènements de la semaine dernière posent des problèmes lourds.
Adrien Quattenens qui intervient en séance et se fait applaudir par ses collègues du groupe LFI. Jean-Luc Mélenchon qui finit une émission sur les retraites en quittant le plateau pour manifester sa colère contre la mise à l’index de cet ancien coordinateur national de LFI. Des députés qui n’hésitent pas à en insulter d’autres au sein de l’hémicycle. Thomas Portes qui pose avec son écharpe de député le pied sur un ballon à l'effigie d'Olivier Dussopt, geste largement soutenu par ses collègues insoumis.
Certes la sanction est disproportionnée. Mais voilà autant de fautes qui d’une part contreviennent aux valeurs de gauche et à son ancrage républicain et d’autre part banalisent la violence en politique.
Quant à la stratégie de l’obstruction par la défense de nombreux amendements, si elle donne une certaine maîtrise du temps du débat parlementaire, force est de constater qu’elle ne permet pas à LFI dans ces conditions d’apparaître comme une opposition crédible. D’autant que les principales organisations du mouvement social la critiquent désormais ouvertement, Laurent Berger dénonçant hier « l'obstruction qui est une connerie » en dénonçant explicitement la méthode de LFI. Et Philippe Martinez a affirmé de son côté « souhaité un vote sur l’article 7 » qui recule l’âge de départ à 64 ans. Il est néanmoins probable que si ce vote ait lieu il soit favorable au projet sinon on voit mal comment la majorité le permettrait.
Mesurons qu’alors que nous nous efforçons à travers des meetings partout dans le pays d’unir forces de gauche écologistes, salarié.es et représentants syndicaux dans un front social et politique, à l’inverse, à travers la Nupes, désignée sans nuance comme irresponsable à l’Assemblée, c’est l’image de toute la gauche, nous y compris, qui pâtit de la stratégie des insoumis.
Notre responsabilité c’est au contraire d’amplifier la mobilisation du monde du travail, des femmes et de la jeunesse pour le retrait du projet de réforme. Et si le gouvernement persiste de préparer une large coalition pour exiger un referendum.
4) Une exigence : amplifier la mobilisation du monde du travail, des femmes et de la jeunesse
Amplifier la mobilisation du monde du travail implique d’abord de parler précisément du travail et du besoin de le libérer du capital.
Chacune, chacun mesure ici que si le mouvement est si puissant, c’est parce qu’il s’ancre dans la réalité du travail. Une réalité si dure que repousser l'âge de la retraite serait insupportable pour des millions de salarié·es subissant déjà l'intensification de l'activité, des conditions difficiles pour des salaires amputés par une inflation élevée, des contrats courts et horaires décalés jusqu'à l'uberisation.
Mesurons à ce sujet, c’est d’actualité, à quel point le pacte que veut imposer le Ministre de l’Education aux enseignantes et enseignants. Un pacte qui renonce à toute réelle revalorisation et qui, pour surtout ne pas créer d’emploi, s’appuie sur l’idée que les profs devraient travailler plus, les poussera par exemple à faire des heures supplémentaires pour du remplacement dans n’importe quelles conditions en comptant sur le fait que leurs bas salaires les obligeront de toute façon à accepter cela.
À l’inverse, nous devons continuer de l’affirmer avec force, la voie du progrès, c'est au contraire la transformation profonde du travail, la création d'emplois, l'augmentation des salaires et l'égalité professionnelle femmes-hommes, la formation, la prise en compte des qualifications et de la pénibilité. C’est la sécurisation de l’emploi et de la formation. C’est la création de nouveaux pouvoirs d’intervention des salarié·es dans l’entreprise comme dans la société.
Dans la foulée de la prochaine journée de mobilisation du 16 février, c’est en portant cette ambition de révolutionner le travail que nous devons fournir un immense effort militant dans les trois semaines qui suivront pour appeler le plus grand nombre possible de salarié.es, de femmes en particulier, et des jeunes à se saisir des journées des 7 et 8 mars prochain.
Le collectif national retraites a mis a disposition des fédérations et des sections une première lettre d’information pour nourrir notre campagne qui a été transmises en fin de semaine dernière.
Un nouveau tract sera disponible dans les jours qui viennent pour appeler aux journées des 7 et 8 mars.
Poursuivons simultanément la diffusion du numéro spécial de l’Humanité qui est un vrai atout dans la bataille et dont le succès ne se dément pas avec des milliers d’exemplaires vendus ces dernières semaines.
Dans les prochaines semaines, en nous adressant très largement aux salariés, aux femmes, aux jeunes, faisons grandir trois enjeux dans notre intervention :
Adressons-nous aux salarié·es les plus touchés par la réforme en allant à leur rencontre à la porte des entreprises.
Le 11 février, les cortèges se sont enrichis de nouveaux visages, souvent jeunes, issus du salariat de TPE et PME, de catégories socio-professionnelles rarement mobilisées mais, aussi, des artisans, des paysans, des professions libérales ainsi que des familles entières.
Adressons-nous aussi aux jeunes qui sont déjà plusieurs dizaines de milliers à avoir participé aux cortèges.
Le quinquennat d’Emmanuel Macron est un désastre pour les jeunes, de sa politique en matière de formation avec la casse de l’éducation nationale, le renforcement de la sélection, la promotion de l’apprentissage au détriment de l’enseignement professionnel jusqu’à ce projet de recul de l’âge de départ en retraite qui touchera durement à la fois ceux qui ont commencé à travaillé tôt que les ceux ayant fait de longues études.
Le gouvernement semble même se faire un point d’honneur à maintenir les jeunes dans la précarité comme le montre son opération honteuse pour faire rejeter in extremis la proposition de loi socialiste visant l’extension du repas à 1 euros à l’ensemble des étudiants.
Adressons-nous aux femmes qui sont également durement touchées par la réforme.
Le 8 mars, déjà 200 actions sont prévues dans le cadre de la grève féministe : manifestations, rassemblements, projections de films, villages féministes… (toutes les informations sont sur le site www.grevefeministe.fr).
À partir de 15h40, rappelons que les femmes travaillent gratuitement puisqu’elles sont payées 28,5% de moins que les hommes selon l'Insee a cause du travail à temps partiel, des carrières hachées, de la dévalorisation des métiers dans lesquelles les femmes sont majoritaires, de la part variable des rémunérations.$
À Paris, la manifestation partira à 14h de la Gare du nord avec de nombreux temps forts : des prises de paroles autour des enjeux internationaux avant le départ à 13h00 puis place de la République avec un temps sur la pauvreté, la précarité avec notamment des travailleuses sociales en lutte, puis au Père Lachaise où sera organisé un femmage pour les femmes victimes de féminicides, au lycée Voltaire où une action sera organisée pour la mixité des filières, revalorisation des AESH et la lutte contre les VSS dans l'ESR, au théâtre de la colline sur la précarité des créatrices et enfin à l'hôpital Tenon pour la revalorisation des soignantes, la création de centres IVG et la fin des violences obstétricales et gynécologiques en lien avec l'affaire Daraï.
Tous ces temps sont autant d’idées d’initiatives que nous pouvons nous-mêmes contribuer à organiser partout en France.
Le collectif femmes mixité de la CGT a également élaboré un powerpoint très utile intitulé « Une réforme contre les femmes » qui sera transmis aux fédérations.
Pour conclure, un mot pour insister sur l’importance dans toutes ces initiatives de travailler au renforcement du PCF.
Nous avons fait près de 500 adhésions depuis le début de l’année. C’est bien plus élevé qu’habituellement à cette période. Veillons à l’intégration de ces nouveaux adhérents et nouvelles adhérentes.
Avec le secteur de la communication nationale, nous allons d’ailleurs réunir quelques-uns de ces adhérents jeudi pour échanger avec eux sur les raisons de leur adhésion et travailler à développer la campagne de renforcement du parti.
Voilà cher·es camarades les éléments que je souhaitais mettre en débat à l’occasion de ce point sur le mouvement social.
Il y a actuellement 0 réactions
Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.