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SNCF sur les rails de la concurrence en mode autoritaire

Recours aux ordonnances et in du statut mais aussi rejet des fermetures de ligne et espoir d’une reprise de la dette par l’État : les détails de la réforme de la SNCF.

Oui le gouvernement utilisera les ordonnances pour réformer et oui il veut mettre fin au statut de cheminot. En revanche, le Premier Ministre a assuré ne pas vouloir « toucher aux petites lignes » dont le rapport Spinetta envisageait la fermeture à hauteur de 9.000 km : hier, Édouard Philippe a présenté les contours et la méthode envisagée pour réformer la SNCF.

« Aller vite » : telle est la justification du recours aux ordonnances avec un Édouard Philippe qui jure ne pas vouloir « escamoter pour autant la concertation et le débat parlementaire ». La concertation sera pourtant menée au pas de charge. Elle commence dès cette semaine en abordant les questions de « l’ouverture à la concurrence » a précisé la Ministre des Transports Elisabeth Borne. A partir de la mi-mars, le deuxième sujet abordé concernera « l’évolution de l’organisation de la SNCF ». Début avril, ce sera la « modernisation sociale du secteur ferroviaire » qui sera sur la table. L’objectif est d’avoir « les principes clés » « avant l’été ».

Au cœur du projet se trouve l’ambition d’avoir une SNCF concurrentielle, le gouvernement demandant à la direction de produire avant l’été « un projet stratégique d’entreprise pour aligner ses coûts sur les standards européens ». A grands traits, les cheminots français sont ceux qui gagnent le moins mais disposent d’un nombre conséquent de jours de récupération ou de congé. Un conducteur de train allemand confirmé gagne ainsi de 3.000 à 3.500 euros pour 39h, en Grande-Bretagne il peut aller jusqu’à 4.700 euros pour 40h… quand en France, il plafonne à 2.500 ou 3.000 euros pour 35h. A une exception près : l’Italie, où les cheminots gagnent peu et travaillent beaucoup permettant aux chemins de fer italiens d’être bénéficiaires. C’est probablement le modèle visé : faire travailler plus sans gagner davantage. D’où la nécessité de s’attaquer au statut.

Ce statut consacre surtout les droits acquis pour contrebalancer les horaires décalés, le travail durant les jours fériés, les vacances… et la faiblesse du salaire. Car pour ce qui relève d’un système de retraite particulier, il a été réformé à terme, les cheminots seront alignés sur tous les salariés. A noter, la sortie d’Emmanuel Macron au Salon de l’agriculture sur le sujet -« Je ne peux pas avoir d’un côté des agriculteurs qui n’ont pas de retraite, et de l’autre avoir un statut cheminot et ne pas le changer »- qui en dit long sur la concurrence espérée entre les travailleurs, fussent-ils dans des contextes et des secteurs incomparables.

Concernant la fermeture des petites lignes non rentables, le gouvernement dit ne pas les retenir. « Dans bien des territoires, le rail est au cœur de la stratégie des régions pour le développement des mobilités » a voulu rassurer Édouard Philippe, la première annonce ayant provoqué une levée de boucliers dans les Régions mais également chez les défenseurs de l’environnement. « Ce n’est pas une réforme qui préparerait la privatisation de la SNCF » a également voulu tranquilliser le Premier Ministre. Des mots. En revanche, concernant les annonces qui pourraient changer les choses, elles sont reportées à plus tard. Il s’agit évidemment de la dette de la SNCF, 46,6 milliards d’euros liés au désengagement de l’État et aux choix de l’entreprise sur consignes de l’État. Édouard Philippe a suggéré une reprise de cette dette par l’État, affirmant que « l’État prendra sa part de responsabilités avant la fin du quinquennat ». Sauf que, il veut qu’avant, l’entreprise SNCF tranche dans le vif.

Angélique Schaller (La Marseillaise, le 27 février 2018)

Le service public ferroviaire en péril

Le rapport Spinetta, commandé par le gouvernement et concocté par l’artisan de la privation d’Air-France, ouvre la voie au démantèlement de la SNCF. Le Premier Ministre a précisé lundi la méthode et le calendrier : c’est une guerre éclair qui est déclarée avec l’arme des ordonnances pour notamment lancer au plus vite la privatisation et dans la même logique supprimer le statut des cheminots pour les nouveaux embauchés; statut qui relève des missions de service public. Tout doit être achevé avant l’été a prévenu Édouard Philippe.

« Il faut aller vite », tel est la mantra de la majorité d’Emmanuel Macron. La privatisation ? C’est, à entendre l’exécutif, Bruxelles qui oblige à préparer l’ouverture à la concurrence des lignes grandes vitesses et des TER prévus dans le 4e « paquet ferroviaire » ; une directive européenne adoptée à une courte majorité par les euro-Députés fin 2016. Sauf que rien n’oblige à « aller vite » et à passer sous les fourches caudines de Bruxelles. La France pourrait faire un tout autre choix. Ce n’est pas celui du libéral Emmanuel Macron.

Opposer les salariés entre eux

Le statut des cheminots? La manoeuvre consiste pour le chef de l’État à opposer les travailleurs entre eux. Or raboter les droits des uns n’a jamais garanti le progrès pour tous ; au contraire. C’est le nivellement par le bas, inauguré avec la réforme du code du travail, qui continue. Quant aux « petites lignes » que le gouvernement affirme épargner, rien ne garantit leur survie, encore moins leur développement, la logique d’ouverture à la concurrence se mariant mal avec la continuité du service public. Une fois dénoncé cette attaque en règle, comment répliquer pour freiner ce train fou de contre-réformes ? La réponse ne peut uniquement venir des cheminots, en état de légitime défense, mais d’un sursaut citoyen et d’un mouvement plus vaste, à leurs côtés.

Françoise Verna (La Marseillaise, le 27 février 2018)

Les syndicats se rencontrent aujourd’hui pour préparer la riposte

Les syndicats de cheminot se retrouvent aujourd’hui en intersyndicale pour décider de la riposte, la CGT puis Sud-Rail et Unsa cheminot ayant d’ores et déjà annoncé une journée d’action pour le 22 mars. Ordonnances, statut, report d’une éventuelle reprise de la dette… Ils ont du grain à moudre et les annonces ont déjà suscité des commentaires énervés. « En cadeau d’anniversaire des 80 ans de la SNCF, on lui dit que finalement elle est responsable de tous les maux du ferroviaire » apprécie pour sa part Didier Aubert de la CFDT, qui a déjà dit vouloir proposer à l’intersyndicale d’aujourd’hui de partir en grève reconductible « dès le 12 mars » tout comme l’Unsa, 2e syndicat à la SNCF. « Une vraie provocation » a renchéri Érik Meyer de Sud-Rail avant de dénoncer « un chantage à l’ordonnance ». Ce recours aux ordonnances a également suscité des oppositions dans l’ensemble de la classe politique qui dénonce une « méthode autoritaire » mais ne semble finalement pas, dans sa majorité, gênée par le fond, si ce n’est le PCF qui y voit une mise « en péril de l’avenir du rail public » et LFI qui dénoncer « la casse du service public du train ». Éric Meyer de Sud-Rail n’est par ailleurs pas dupe de « la manœuvre » du gouvernement « pour faire baisser la mobilisation et pour essayer de (la) rendre impopulaire » car recentrée sur le statut des cheminots. L’annonce de l’abandon des propositions concernant les fermetures de lignes a en effet provoqué le contentement des Régions ou de l’association des petites villes de France même si, toutes deux, disent vouloir rester « très vigilantes » notamment « sur le financement de ce réseau ‘capillaire’, en particulier au respect des Contrats de plan État/ régions permettant sa rénovation ».

Angélique Schaller (La Marseillaise, le 27 février 2018)

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